20 millions d’euros de chiffre d’affaires. 340 salariés. 7 agences en France. Bientôt d'autres à l'étranger. En onze ans, Groupe Créative est devenu l'un des grands prestataires de services accompagnant ses clients dans leur mutation numérique. Son champ d'action s'étend de l'application industrielle jusqu'aux systèmes embarqués. L'entreprise travaille pour des PME, mais aussi pour des groupes comme Thales, Canon ou BNP Paribas. Elle collabore actuellement avec Rainbow, l'équipe de recherche en vision robotique du centre Inria Rennes – Bretagne Atlantique.
Ce projet commun s'appelle Explore. “Il vise à modéliser les locaux de nos différentes agences pour permettre ultérieurement une visite à l'aide de lunettes de réalité virtuelle, résume Antoine Lehuger, responsable de Creative Minds, la cellule innovation de l'entreprise. Pour ce faire, nous utilisons un robot Pepper équipé d'une caméra. De façon autonome, il va explorer toutes les pièces afin de capturer les images qui serviront ensuite à reconstruire l'environnement 3D. Ce travail comporte donc deux aspects. L'un porte sur l'exploration/acquisition. L'autre sur la reconstruction.”
Naviguer à vue
Pour l'exploration, l'entreprise s'appuie sur l'expertise de l'équipe Rainbow dans le domaine de la navigation robotique fondée uniquement sur l'image. Autrement dit : sans aucune connaissance a priori de l'environnement. “Quand on pose le robot dans un coin, il ne sait pas quelle est la taille des locaux. Où se trouvent les murs. Où se trouvent les couloirs. Il doit donc tout découvrir sans disposer des plans. Avec l'intelligence dont nous allons le doter, il va se déplacer en fonction d'un retour d'information sur ce qu'il aura vu ou pas vu. Ainsi, progressivement, il va construire une cartographie de nos locaux.” Pour ce faire, il faut aussi le doter d'un tropisme : “le robot doit se diriger de préférence vers des zones encore inconnues où il y a donc potentiellement des choses à découvrir.”
Ce domaine de l'exploration autonome et intelligente se heurte à beaucoup de verrous scientifiques. “La littérature n'est pas encore très fournie. Il n'existe pas d'outils sur étagère.” Pour travailler sur ce domaine avec l'équipe de recherche, l'entreprise finance une thèse de doctorat dans le cadre du dispositif Cifre (2). Effectuée par Benoît Antoniotti (3), cette thèse est co-encadrée par Antoine Lehuger, et les chercheurs Eric Marchand et François Chaumette.
Reconstruction 3D
Deuxième aspect : la reconstruction 3D. “Ce domaine a été beaucoup étudié. Il existe aujourd'hui des méthodes que l'on peut utiliser. Mais dans notre contexte applicatif, cela s'avère moins évident qu'il n'y paraît. Il faut parvenir à un niveau de qualité d'image acceptable pour l'œil humain dans des lunettes de réalité virtuelle. Or la reconstruction fonctionne bien pour de petits objets. Moins bien, en revanche, pour de grands espaces. Le plus gros enjeu consiste à faire en sorte que le logiciel puisse s'auto-évaluer d'une façon complètement automatique sur la qualité de ce qu'il produit. Il doit détecter les erreurs dans la prise de vues. Éliminer ces imperfections. Ne garder que les informations fiables.”
Pour cette partie, l'entreprise a embauché un jeune docteur. “Salah Eddine Kabbour vient de soutenir sa thèse. Nous l'avions recruté quelques mois avant. Par ailleurs, un autre de nos collaborateurs, expert en C++, s'est chargé d'optimiser les algorithmes d'Orb-Slam, logiciel open source de reconstruction 3D. Nous avons retravaillé le code pour l'industrialiser. Nous publierons bientôt cette version améliorée sur la plate-forme open source GitLab.”
R&D 2.0
Contrairement aux apparences, ce projet ne constitue pas un travail de R&D classique : il n'ambitionne pas d'aboutir à la mise sur le marché d'un produit ou d'un service. “Nous sommes dans une démarche complètement différente. En 2015, nous avons créé une cellule innovation, dont j'ai pris la direction. Son but est de piloter la montée en compétence à la fois de l'entreprise et de ses personnels. Nous sommes partis d'un constat : entre deux missions chez nos clients, nous avons des collaborateurs parfois disponibles pendant un ou deux mois. Nous trouvions dommage de pas utiliser ce temps de pause pour leur permettre de se former à de nouvelles technologies, à d'autres logiciels, etc. À certains moments, nous pouvons avoir une vingtaine de personnes ainsi disponibles. Nous avons donc décidé de piloter ce temps en élaborant des projets innovants auxquels les uns et les autres pourraient, tour à tour, participer pour acquérir de nouvelles compétences. Charge à moi de proposer des sujets qui puissent correspondre à la grande diversité des profils dans l'entreprise.”
Autre particularité : “cette démarche est entièrement financée sur fonds propres.” Donc à fonds perdus ? “Non car nous constatons en fait un retour sur investissement. Nous réduisons le turn-over. Nous fidélisons nos collaborateurs. Pour eux, ces formations à des technologies de pointe constituent aussi un plus vis-à-vis des clients. Par ailleurs, cette cellule nous renforce également dans nos activités de conseil. Elle nous différentie de certaines sociétés de service.” Exemple ? “Un de nos clients cherche une solution pour l'identification automatisée de ses vaches dans le troupeau. Il se demande quelles sont les différentes méthodes dans l'état de l'art. Ses prestataires habituels pourront difficilement lui répondre. C'est trop scientifique.”
Vers des projets collaboratifs
Outre ses travaux en robotique et reconstruction 3D, la cellule Creative Minds s'apprête aussi à explorer d'autres thèmes. Le prochain ? “La blockchain.” Pour faire du minage ? “Non. Pas du tout. Nous voudrions élaborer une crypto-monnaie en interne. Cette Creative Coin serait un pécule que nos collaborateurs recevraient et qu'ils pourraient échanger contre quelque chose, une entrée dans un salon professionnel par exemple. Dans la blockchain, il y a des concepts qui peuvent, à terme, intéresser nos clients. En particulier ce que l'on appelle le smart contract ou le proof of authority.” Là aussi Antoine Lehuger envisage d'inviter un laboratoire dans la boucle. “Nous trouvons que le partenariat entre notre savoir-faire industriel et celui du monde académique se conjugue bien sur certains sujets. D'ailleurs, dans le prolongement de cette démarche, nous serions maintenant intéressés à rejoindre des laboratoires de recherche publique dans des projets européens.”
Qui est le robot Pepper ?
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