Une bourse ERC Consolidator Grant pour Martin Vohralík

Date:
Mis à jour le 01/04/2020
Est-il possible de garantir la précision dans les simulations numériques ? Est-il également possible de faire mieux interagir les différentes composantes d'un algorithme numérique afin d'accélérer les simulations numériques actuelles par un facteur allant jusqu'à plusieurs ordres de grandeur ? Ce sont les questions posées dans le projet Gatipor (Guaranteed fully adaptive algorithms with tailored inexact solvers for complex porous media flows) de Martin Vohralík. Son projet bénéficie du soutien du Conseil européen de la recherche (European Research Council , ERC), qui lui a attribué une bourse Consolidator Grant.
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© Inria / Photo C. Morel

Dans quel domaine travaillez-vous à Inria ?

Je travaille sur le développement de méthodes numériques pour la simulation des équations aux dérivées partielles (EDP) sur ordinateur. Au sein de l'équipe-projet Pompadi, nous abordons traditionnellement les équations décrivant les phénomènes de l'environnement tels que l'écoulement de fluides et transport de contaminants dans un milieu poreux souterrain. Ces équations sont un peu effrayantes : instables dans le temps, non linéaires, dégénérées, couplées... Parmi les applications les plus importantes, on compte la prévision et la conception de solution de remédiation de contamination des sols suite à une infiltration chimique, les calculs de sûreté pour les stockages souterrains envisagés des déchets radioactifs ou encore les vérifications numériques de projets de séquestration géologique du CO2.

Quel est le contenu de votre projet Gatipor ?

Bien que les simulations numériques des milieux poreux soient un sujet de recherche important depuis des années, dans la pratique computationnelle, la précision du résultat d'une simulation numérique n'est presque jamais garantie et, de façon surprenante, souvent jusqu'à 90% du temps CPU est littéralement perdu. La tâche est extrêmement difficile car elle relie plusieurs domaines distincts tels que la modélisation mathématique, l'analyse des EDP, l'analyse numérique, l'algèbre numérique linéaire et le calcul scientifique.

Dans le projet Gatipor, nous voudrions proposer de nouveaux solveurs inexacts algébriques et de linéarisation. Ici, chaque pas sera perçu dans le contexte de l'EDP donnée, et conduit de manière adaptive par un estimateur a posteriori . Cela nécessite une connexion de toutes les composantes d'une simulation numérique (du solveur algébrique, du solveur de linéarisation, de la discrétisation en espace et du schéma en temps) où à chaque moment, on analyse ce qui se passe pour pouvoir faire le prochain pas dans la direction optimale. Des ingrédients numériques essentiels seront un solveur algébrique de type multigrille qui dépend du problème et de la discrétisation donnés, ainsi que des critères d'arrêt locaux. Nous tâcherons de prouver la convergence de ces nouveaux algorithmes et de justifier théoriquement leur optimalité. Nous voudrions également tester leur fonctionnement pour les problèmes réels décrits ci-dessus. Le but final : certifier l'erreur totale commise dans une simulation numérique et diminuer par des ordres de grandeur le coût de calcul actuel.

Que signifie une estimation d'erreur a posteriori ?

Ces dernières années, une théorie mathématique très efficace a été développée. Elle permet "un miracle" : estimer l'erreur au niveau d'une simulation numérique sans qu'on connaisse la solution exacte. Les estimations a posteriori sont au cœur du projet Gatipor.

Qu'est-ce que cette bourse signifie pour vous ?

Une reconnaissance de la part de la communauté entière. De très bonnes ressources matérielles pour poursuivre mon travail. Et aussi une récompense pour toute ma famille, pour les nombreuses nuits blanches...

Qu'est-ce que vous a attiré dans ce domaine de recherche ?

J'ai toujours été amoureux des mathématiques, mais j'étais aussi attiré par des choses applicables, pour que ce que je fais puisse servir directement à la pratique. C'est comme cela que j'en suis arrivé à la modélisation mathématique, et plus précisément analyse numérique.

Martin Vohralík
© Inria / Photo C. Morel

Bio Express


Né en 1977 en République Tchèque, Martin Vohralík a effectué son doctorat en cotutelle entre l'université de Paris-Sud (laboratoire de Mathématiques) et l'université technique Tchèque à Prague (Faculté de génie nucléaire et de science de l'ingénieur). Il entame ensuite sa carrière de chercheur postdoctorant au Centre national de la recherche scientifique à Orsay entre le CNRS et la société HydroExpert. En 2006, Martin Vohralík rejoint l'université Pierre et Marie Curie (laboratoire Jacques-Louis Lions) en  tant que maître de conférences, avant d'intégrer l'équipe-projet Pomdapi chez Inria comme directeur de recherche en 2012. Il a été lauréat du “prix de recherche” de l’entreprise Siemens pour sa thèse de diplôme en 2000, a bénéficié entre 2008 et 2011 du “J. T. Oden Faculty fellowship ” pour séjourner à l’université du Texas à Austin, et est membre du bord des éditeurs du SIAM Journal on Numerical Analysis depuis 2013.