Acteurs de l’EdTech et Éducation nationale peuvent-ils se comprendre ? C’est le pari que fait le Cluster Edtech Nouvelle-Aquitaine, né de la synergie inédite entre l’agence de développement économique Talence Innovation Sud Développement et le rectorat de Bordeaux.
Notre rôle est d’aider les porteurs de projet à bien définir leur objet en intégrant notamment un programme d’expérimentation auprès d’élèves et d’enseignants.
Pour provoquer la rencontre, le Cluster organise, les 3 et 4 mai, des rencontres avec la mission des achats du ministère de l’Éducation nationale et du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, la direction du numérique pour l’Éducation (ministère de l’Éducation nationale) et des collectivités locales. Les équipes d’Inria sont depuis longtemps engagées pour imaginer l’éducation de demain, notamment dans le cadre du projet Class’Code, destiné à donner aux enseignants des outils pour former les enfants au code, mais également dans des projets de robotique pour l'éducation comme IniRobot et Poppy Education . Deux équipes-projet Inria, Flowers et Potioc, seront donc naturellement présentes lors de cet événement pour présenter leurs travaux.
Quand la machine s’adapte aux enfants
Le marché de l'éducation est assez complexe à décrypter pour les non-initiés, il y a beaucoup d'acteurs nationaux et régionaux, des pratiques et des chemins de décision différents selon les cycles, les niveaux et les disciplines. Un moyen de dynamiser la collaboration entre l'éducation et la recherche est de créer des groupes de travail permettant des rencontres et des échanges, facilitant les expérimentations, la définition des usages et la pertinence des dispositifs.
explique Didier Roy, chercheur au sein de l’équipe Flowers, après trente années dans l’éducation nationale. Il a coordonné la participation d’Inria à cette journée. Son équipe, pluridisciplinaire, travaille depuis plusieurs années à modéliser les mécanismes d’apprentissage chez l’enfant, afin de personnaliser les enseignements. L’objectif : proposer à chacun des séquences pédagogiques stimulantes, motivantes et efficaces grâce au machine learning. L’une des applications de ces travaux s’appelle Kidlearn, un logiciel destiné à des enfants de CE1, pour l’apprentissage du calcul et de la monnaie. Les enfants utilisent leur porte-monnaie virtuel pour acheter des produits dont les prix sont plus ou moins compliqués. Ce logiciel sert de support aux expérimentations de leurs algorithmes de personnalisation. À partir de ses réponses, l’application repère les particularités de l’enfant et adapte les exercices. Ce logiciel a montré son efficacité lors d’une expérimentation à grande échelle auprès de plus de 500 élèves en Nouvelle Aquitaine. Autre exemple, Kid Breath, qui permet aux enfants asthmatiques de mieux comprendre leur maladie, afin de les encourager à prendre leur traitement. “Nous espérons surtout avoir un retour sur nos travaux, afin d’en valider l’intérêt pédagogique,” s’enthousiasme le responsable de l’équipe, Pierre-Yves Oudeyer.
Quand la machine se fait oublier
L’équipe Potioc fait quant à elle le pari de la réalité augmentée pour encourager la coopération et l’expérimentation :
L’utilisation du numérique en classe se résume souvent à l’utilisation de postes informatiques ou de tablettes , explique Martin Hachet, responsable de l’équipe. Mais ces outils sont peu adaptés au travail de groupe et ne font pas appel à l’expérimentation physique, qui sont pourtant de très bons leviers d’apprentissage.”
C’est pourquoi ces spécialistes de l’IHM (interaction humain-machine) ont développé plusieurs approches et systèmes interactifs qui permettent d’aller au-delà des systèmes informatiques traditionnels. Ces travaux sont notamment au cœur du projet de recherche e-tac (en lien avec l’Université de Lorraine), dont l’objectif est de favoriser l’apprentissage collaboratif au travers d’activités de mind-mapping hybrides, mixant interactions tangibles (avec des objets physiques) et représentations numériques en réalité augmentée. Les enfants collaborent, échangent et manipulent pour mieux apprendre. “La machine se fait oublier, les enfants ne travaillent pas sur écran,” ajoute Martin Hachet.
Les travaux de Potioc ont également trouvé une application dans le projet Hobit, un système de réalité augmentée qui reproduit une expérimentation que réalisent tous les étudiants en physique pour comprendre le caractère ondulatoire de la lumière : celle de l'interféromètre de Michelson. Au-delà de la simulation du phénomène physique, des informations complémentaires sont projetées en réalité augmentée à l’endroit où a lieu la manipulation. L’équipe présentera enfin Teegi, un outil d’aide à la compréhension du cerveau humain ainsi que Aïana, un lecteur de MOOC accessible à tous. “Notre objectif pour cet événement : passer de l’état de prototype en labo à une expérimentation à plus grande échelle, pour que nos recherches puissent avoir un réel impact dans le domaine de l’éducation,” conclut Martin Hachet.