Optimiser la recherche de financements des chercheurs et entrepreneurs
Arrandi. Derrière la sonorité méditerranéenne de mon nom se cache la transcription phonétique et francisée des lettres "R&D", prononcées à l’anglo-saxonne. Le calembour polyglotte annonce d’emblée mon champ d’intervention et la méthode par laquelle je me propose de l’investir : la fouille de texte par exploration lexicale. Mon objectif est simple : aider les chercheurs ou entrepreneurs à identifier rapidement et efficacement dans la masse des appels à projets lancés aux niveaux régional, national, européen ou international par une multitude de financeurs différents, ceux qui correspondent le mieux à leurs besoins et attentes.
Le montage d’un projet R&D impose une somme de travail souvent écrasante qui commence par l’identification des sources de financement adaptées, se poursuit par la recherche et le décryptage de documents pouvant aller de quelques dizaines à plusieurs centaines de pages et se termine par la constitution du dossier de candidature. « La démarche est si lourde, en comparaison de son taux de succès, que certains chercheurs y renoncent tant elle est par ailleurs chronophage, explique Pierre Séry, mon créateur. En 2017, une étude de l’Inserm révélait que le montage d’un projet de R&D simple nécessitait en moyenne 23 jours-homme, ce qui équivaut à plus de 10 000 €, et pouvait aller, pour un projet complexe, jusqu’à 270 jours-homme soit plus de 120 000 €. » Ce temps, que les chercheurs ou entreprises passent à essayer de trouver des financements pour de futurs travaux, je me propose de le réduire au moins de 50 % en automatisant les opérations de collecte et d’évaluation des données.
Traitement automatique des langues et datavisualisation
Pratique, je me présente sous la forme d’une plate-forme accessible par abonnement, sur laquelle les utilisateurs viennent préciser certains critères de recherche. Mon intelligence artificielle (IA) va alors extraire des dizaines de milliers de pages des appels à projets diffusés sur Internet les éléments les plus pertinents par rapports aux informations renseignées (type de partenaire recherché, domaine d’activité, budget, etc.) avant de les exposer sous une forme aisément consultable. Pour cela j’utilise deux outils : le traitement automatique des langues (TAL) pour la sélection des données, la datavisualisation pour la présentation des résultats. « J’ai une pensée plutôt visuelle que le Mind mapping me permet de formaliser de manière claire et précise, confie Pierre Séry. L’idée était de s’inspirer de ces méthodes de visualisation de données pour présenter les informations essentielles des appels à projets et faciliter ainsi leur prise en compte. Pour ce qui est de leur examen préalable, il est réalisé à l’aide du TAL qui a connu une évolution considérable ces cinq dernières années du fait, en particulier, des perfectionnements des moteurs de recherche. » Pour autant, je ne suis pas un simple moteur de recherche dont le principe de fonctionnement, basé essentiellement sur un système de référencement par mots-clés, crée des biais qui peuvent limiter le domaine d’investigation. Si le data scientist Alexis Frisson, l’associé de Pierre Séry, a utilisé pour mon développement informatique des outils existants, il les a adaptés à mes besoins en intégrant, entre autres, les spécificités terminologiques des jargons utilisés dans les appels à projets.
Gagner en temps et en efficacité dans la recherche d’appels à projets
À ce jour, je suis en cours de finalisation et plus de 200 prospects participent à des tests qui me permettent de m’améliorer encore avant mon lancement officiel prévu pour le 1er avril 2023. Plus qu’encourageants, ces premiers essais confirment mes performances en même temps que mon utilité puisque plusieurs cas d’usage ont démontré que j’étais capable d’identifier un appel à projets adapté en quelques clics et une poignée de minutes quand un traitement manuel aurait nécessité plusieurs heures, voire plusieurs jours. J’en veux pour preuve ce témoignage de Pierre Séry : « Lorsque nous avons intégré Inria Startup Studio en avril dernier, j’ai échangé avec un enseignant-chercheur du Loria. Il s’est montré très intéressé par nos travaux parce qu’il portait depuis 2019 un projet pour lequel il ne parvenait pas, malgré des recherches poussées, à trouver de financement. En utilisant Arrandi, nous avons pu identifier en une demi-heure un appel à projets auquel il a répondu au mois de juin. Nous avons appris la semaine dernière que son dossier avait été validé et allait être financé à hauteur de presque 300 000 €. »
Verbatim
Arrandi synthétise en quelques mots essentiels, présentés de manière claire, des appels à projets de plusieurs centaines de pages rédigés en langage technocratique, parmi lesquels il est toujours compliqué de trouver celui qui vous convient le mieux d’un point de vue scientifique aussi bien que financier. C’est un peu comme résumer un film à son pitch. Le gain de temps et d’énergie est considérable pour les chercheurs. Et efficace : cela nous a permis d’identifier l’appel à projets ASTRID financé par l’Agence de l’innovation de défense et mis en œuvre par l’ANR, pour lequel nous avons été retenus.
professeur en informatique à l'Université de Lorraine et responsable du groupe de recherche SMART au sein du Loria
Des outils et une méthodologie adaptables
Mes ambitions sont à la hauteur des espoirs portés par les résultats de mes tests de validation. Sur mes trois premiers exercices de fonctionnement, je vise une croissance de 100 % chaque année pour atteindre un million d’euros de chiffre d’affaires lors de la quatrième. Pour cela, je pense déjà à l’avenir et à la façon dont je pourrai tirer profit de mes savoir-faire actuels pour aborder d’autres marchés. « Il existe de nombreux secteurs dans lesquels la recherche d’information se heurte à la quantité ou à la complexité des textes à prendre en compte. C’est une problématique à laquelle sont confrontés, par exemple, les startups juridiques qui doivent traiter de très grandes quantités de documents législatifs ou réglementaires afin de conseiller au mieux leurs clients. Nous cherchons à faire évoluer les outils et la méthodologie que nous avons mis en place vers d’autres niches spécifiques. » Les perspectives sont prometteuses. J’ai d’ores et déjà été abordé par un grand groupe de BTP français qui me demande si je suis capable d’adapter ma plate-forme à leurs besoins particuliers. Capable, je le suis assurément : j’en ai les moyens et l’envie.
Inria Startup Studio : « Un environnement de travail exceptionnel »
Conscients des enjeux et contraintes liés au principe de fonctionnement des appels à projets, les deux créateurs d’Arrandi ont su élaborer des méthodologies de traitement innovantes. Il faut dire que Pierre Séry a du sujet une connaissance solide et pratique : « Au cours de mes quinze années d’expérience dans le financement de la recherche et de l’innovation, j’ai occupé plusieurs postes qui m’ont amené soit à chercher des sources de financement, lorsque je travaillais au CNRS par exemple, soit à en proposer quand je travaillais au sein de collectivités territoriales comme le Grand Nancy ou la région Grand Est. » Alexis Frisson de son côté s’appuie sur ses compétences d’ingénieur en IA et de spécialiste du traitement automatisé des données pour développer un système innovant de cartographie et d’analyse des offres existantes. Il ne leur restait qu’à trouver le cadre qui leur permettrait de mener à bien leurs travaux. « Inria Startup Studio offre un environnement de travail exceptionnel puisqu’il prend en charge nos salaires pendant un an, nous alloue un budget de fonctionnement pour construire notre projet et nous permet de côtoyer au quotidien des chercheurs et chercheuses, et enseignants-chercheurs et enseignantes-chercheuses. »
Le témoignage de Pierre après un an chez Inria Startup Studio