[Reportée] Conférence "Comprendre et Agir" : La neutralité en science : du mythe au déni de responsabilité ?
655 Avenue de l'Europe
CS 90051
,
38334 Montbonnot
[Conférence reportée au mardi 8 octobre]
Le respect de l’exigence de neutralité est réputé conditionner l’objectivité des productions scientifiques en écartant toute collusion de la recherche avec, entre autres, des engagements politiques.
Deux questions se posent : cette neutralité peut-elle être davantage qu’un mythe ou un fantasme en réalité nuisible à l’objectivité des savoirs ? Ne faut-il pas alors envisager que l’exigence de neutralité serve une autre fin, que l’on pourra justement qualifier de politique, à savoir le déni de la responsabilité des sciences dans l’organisation de la cité ou de la vie en commun ?
On introduira cette hypothèse avec le cas des mathématiques, où se déploient depuis quelques années des réflexions inattendues et stimulantes sur l’éthique de la recherche dans la discipline. La lecture critique de l’avis rendu par le comité d’éthique du CNRS (COMETS) en décembre 2022, portant sur l’intégration des enjeux environnementaux à une conduite responsable de la recherche, sera ensuite l’occasion de revenir sur le concept de "neutralité axiologique" que l’on doit au sociologue allemand Max Weber, régulièrement mobilisé pour dénoncer la partialité des savoirs critiques produits en sciences humaines et sociales.
On pourra alors prendre à bras le corps le problème épistémologique du rôle des valeurs en science, et s’interroger sur les enjeux individuels et collectifs d’une prise de parti des chercheurs et chercheuses en faveur d’un monde meilleur.
Marlène Jouan est maîtresse de conférences en philosophie morale à l’Université Grenoble Alpes, rattachée à l’IPhiG (Institut de Philosophie de Grenoble) dont elle est la directrice-adjointe et associée à l’ISJPS (Institut des Sciences Juridique et Philosophique de la Sorbonne), membre junior de l’IUF (Institut Universitaire de France).
D’abord consacrés à la question de l’autonomie personnelle, ses travaux de recherche portent depuis plusieurs années sur la gestation pour autrui, au croisement de la bioéthique, de la philosophie sociale et des études de genre. C’est plus récemment, à travers sa participation à plusieurs comités d’éthique et à la formation doctorale à l’intégrité scientifique et à l'éthique de la recherche, qu’elle s’est intéressée aux rapports entre science, éthique et politique. Dans ce cadre elle est la codirectrice du n°7 de la revue Pistes, portant sur l’éthique des mathématiques, à paraître au printemps 2025.