Décès de Roland Glowinski

© B. Eymann / Académie des Sciences

Né à Paris en 1937, fils d'immigrés juifs polonais cachés par des Français à la campagne pendant la Seconde Guerre mondiale, Roland Glowinski a, très tôt, fait preuve d'un talent précoce dans divers domaines, notamment en mathématiques et en sciences. Des facilités qui l’amèneront à se spécialiser en mathématiques et lui permettront d’intégrer l’École polytechnique, dont il est sorti diplômé en 1960.

Il faudra cependant attendre la fin des années soixante pour que Roland Glowinski se tourne définitivement vers l'informatique et les mathématiques appliquées, à la suite d’un cours de perfectionnement à l’École Polytechnique organisé notamment par Jacques-Louis Lions. C’est aux côtés de ce dernier, alors à la tête du Laboria d’IRIA en 1970 (et qui deviendra le premier président de l’INRIA de 1979 à 1984,) qu’il passera une partie de son début de carrière.

Sur la base de ses travaux en DEA, Jacques-Louis Lions devient son directeur de thèse ; Roland intègre alors l’IRIA en tant qu'ingénieur de recherche. En 1970, il obtient son doctorat de l'université Pierre et Marie Curie (Paris VI) en soutenant une thèse sur la résolution d’équations intégrales non linéaires pour le filtrage de la transmission de la télévision en couleur. Après l'obtention de son diplôme, il est nommé professeur à l'université Pierre et Marie Curie et devient directeur scientifique d'Inria.  

C’est quelqu’un dont j’étais extrêmement proche. C’est un homme qui avait énormément de qualités, au-delà de ses talents en mathématiques, il avait vraiment quelque chose en plus.

                                                                            Alain Bensoussan, président de l'INRIA de 1984 à 1996

Roland passera quinze ans à l’institut. Une période au cours de laquelle il s’impose comme l'un des principaux chercheurs mondiaux en mathématiques appliquées et en calcul scientifique. Ses travaux portent notamment sur la résolution numérique et la simulation de phénomènes modélisés par des équations aux dérivées partielles issues de la mécanique, de la physique et des sciences de l'ingénieur ainsi que la conception et le contrôle optimaux de systèmes régis par des systèmes d'équations aux dérivées partielles et/ou d'équations différentielles ordinaires.

Je suis touché de son décès. C’est quelqu’un qui a vraiment compté pour moi. J’avais vraiment hésité à m’engager vers la recherche et c’est l’échange que j’ai eu avec Roland qui a été décisif. Il était très attachant

                                        Bernard Larrouturou, Président-directeur général de l'INRIA de 1996 à 2003

Soucieux de l'applicabilité des résultats de recherche aux problèmes technologiques, Roland était également pionnier dans le transfert entre recherche et industrie. Son travail d'approximation et de description par éléments finis d'un écoulement transsonique choqué autour d'un avion Falcon 50 de Dassault Aviation entièrement configuré en est un exemple, permettant une importante et durable collaboration entre Inria et Dassault Aviation.

Roland était l’âme du bâtiment 16 (Inria Rocquencourt), il a beaucoup participé au rayonnement d’Inria à l’international et a énormément marqué notre vie. C’était le conducteur spirituel de beaucoup d’entre-nous.

                                                                            Marina Vidrascu, directrice de recherche à Inria Paris 

Il restera à l’institut jusqu’en 1985, avant de s’envoler pour les États-Unis où il accepta une chaire de professeur à l'université de Houston. « Le professeur le plus inspirant que j'aie jamais eu, il vous donne envie d'étudier les mathématiques. Il ne semble pas qu'il enseigne très souvent aux étudiants de premier cycle, mais s'il le fait, vous devriez absolument saisir l'occasion de suivre son cours », peut-on lire à son sujet sur le site RateMyProfessor.

Parallèlement, Roland conserve son statut de détaché à l'université Pierre et Marie Curie et est conseiller à de nombreuses institutions et agences scientifiques des deux côtés de l'Atlantique. Nous pouvons notamment citer son rôle de membre du conseil scientifique d'Électricité de France (EDF) de 1990 à 1996, de conseiller de l'IFP Énergies nouvelles (anciennement Institut Français du Pétrole) à partir de 1990, ou encore son poste de directeur du Centre européen de recherche et formation avancée en calcul scientifique (CERFACS) à Toulouse, de 1992 à 1994.

Au cours de sa carrière, Roland a écrit ou coécrit plus de quatre-cents articles scientifiques, dix livres, et a été rédacteur en chef de plus de vingt revues et anthologies scientifiques. Il a été invité à donner des conférences dans des universités et des institutions scientifiques du monde entier, et il a été l'orateur principal de nombreux congrès scientifiques.

Depuis l’annonce officielle de sa disparition, les messages de sympathie affluent sur les réseaux. « Un chercheur puissant et inspirant pour des générations. Il a aussi, avec Jacques-Louis Lions et d’autres, beaucoup œuvré pour les liens entre recherche et entreprise », déclare Armel de la Bourdonnaye, actuel directeur de l'INSA Hauts-de-France et ancien chercheur chez Inria. Quang Vinh Dinh, ingénieur de recherche chez Dassault Aviation, déclare quant à lui :« Quelle tristesse en effet d’apprendre la nouvelle du décès de Roland Glowinski. Il fut mon directeur de thèse et m’avait lancé sur les premiers pas du HPC. »  

Inria adresse ses sincères condoléances à son épouse Angela Glowinski, dont le soutien sans faille de la carrière de Roland est bien connu dans la communauté scientifique.