Qu’est-ce qu’un logiciel libre ?
Un logiciel libre est un logiciel dont l’utilisation, l’étude, la modification et la duplication par un utilisateur en vue de sa diffusion sont autorisées, et ce en appliquant des licences libres qui permettent aux utilisateurs d'accéder au code source de ces logiciels.
Contrairement à un logiciel propriétaire, son code source est accessible pour permettre à quiconque souhaite consulter, copier, redistribuer et même modifier le logiciel, à quelque fin que ce soit.
Quel est l’intérêt du logiciel libre ?
La libre accessibilité et la malléabilité sont les principales raisons pour lesquelles le logiciel libre est aujourd’hui un indispensable dans tous les domaines de la recherche scientifique, comme outil, comme produit, et comme objet de recherche. Il favorise ainsi le partage de connaissances entre scientifiques, mais également le transfert vers l’industrie.
La transparence du logiciel libre permet, également, de comprendre exactement comment le logiciel fonctionne et ce qu'il fait, mais également de s’assurer qu'aucune fonction cachée indésirable n'est intégrée ou que le logiciel exploite secrètement des données. « Dans la recherche, le logiciel libre est vraiment important, car c’est la seule manière de savoir si le logiciel fait ce qu’il est censé faire », explique Morane Gruenpeter, ingénieur logiciel et spécialiste des métadonnées chez Inria dans l’équipe Software Heritage, avant d’ajouter « sans avoir accès au code, il est impossible d’assurer que la démarche derrière le logiciel est correcte ».
Enfin, le code source ouvert permet à chacun d'adapter les programmes de manière flexible à ses propres besoins, donnant la possibilité à des organisations non logicielles de toutes tailles et de tous secteurs de produire des logiciels. Ces organisations participent également, en retour, à des projets à code source ouvert partagés via des plates-formes telles que GitLab, contribuant à perpétuer la création et la disponibilité des logiciels libres.
Si la popularité du logiciel libre n'a cessé de croître au fil des ans, tant dans la recherche que dans l’industrie, celui-ci n’est pas encore reconnu à sa juste valeur. Une problématique pointée du doigt dans le monde de la recherche, qui demande une plus grande reconnaissance des logiciels : « Les scientifiques créent différents produits de recherche : les publications, les données, et les logiciels. Or, aujourd’hui, les publications sont mises en valeur car elles donnent du crédit au travail des chercheurs, de la reconnaissance. À l’inverse, il y a encore peu de reconnaissance vis-à-vis des logiciels. Pourtant ces trois produits de recherche sont complémentaires et nécessaires. Il y a une dynamique entre ces trois «objets » », indique Morane Gruenpeter.
Quelle place pour le logiciel libre chez Inria ?
Si la problématique de reconnaissance du logiciel libre est présente à l’international, chez Inria, celle-ci ne se pose pas.
L’institut s’est en effet, très tôt, impliqué dans le logiciel libre, au travers notamment de la création de nombreux logiciels libres tels que Coq , Eigen, Guix, MMG, OCaml, Pharo, Scikit-Learn, ou encore Scilab, conçus pour certains aux côtés de partenaires académiques et industriels.
Et pour accompagner le déploiement de certains de ces logiciels, dont le niveau de maturité technologique leur permet de dépasser le stade d’outils de recherche et de preuves de concepts académiques, Inria lançait en 2017 InriaSoft. Ce dispositif de soutien aux logiciels open source permet ainsi la création de consortiums réunissant industriels et laboratoires, prêts à mettre des moyens financiers, humains et techniques en commun au service de leur déploiement.
Parallèlement, Inria lançait en 2020 Inria Academy, un dispositif de formation continue centrée sur les logiciels libres, dans le but d’accompagner les entreprises en demande d’acquisition ou de montée en compétences sur ces logiciels. Les formations, dispensées par les chercheurs ou ingénieurs Inria contribuant au développement des logiciels, permettent de progresser rapidement dans les domaines de la deeptech tels que le calcul géométrique (CGAL), les vérificateurs de preuve (Coq), la programmation objet avancée (Pharo), l’apprentissage automatique (Scikit-learn), la simulation multiphysique (SOFA) ou l’Internet des objets (RIOT).
L’institut est également à l'origine de Software Heritage, une initiative dont la mission est de collecter les codes sources des logiciels disponibles publiquement, dans l’objectif de les préserver, d’une part, mais aussi de faciliter leur utilisation au service de l’intelligence collective.
« L’importance du code source a longtemps été sous-estimée. La plupart des utilisateurs pensaient logiciel exécutable et non pas code source, ce qui fait que certains projets anciens sont définitivement perdus puisque leur code source est aujourd’hui sur une machine qui n’existe plus, dans un laboratoire qui n’existe plus. C’est dommage parce que ça fait partie d’une base de connaissances qui devrait être préservée », explique Morane Gruenpeter. « Avec Software Heritage, nous avons décidé d’investir massivement sur le patrimoine existant. Ce serait impensable aujourd’hui de se dire qu’on ne préserve pas la connaissance. C’est important pour l’humanité de sauvegarder ce savoir-faire, afin de permettre aux générations futures d’y avoir accès et de pouvoir se baser dessus pour le développement futur », conclut-elle.
Inria et les logiciels libres en quelques dates
- 1996 : des chercheurs et chercheuses Inria commencent à développer l’éditeur et navigateur web AMAYA , conjointement avec le consortium W3C ;
- 1997 : des chercheurs et chercheuses Inria développent Coq, un système qui permet le développement et la vérification de preuves formelles (une étape déterminante pour démontrer la fiabilité de logiciels). Il est intégré aujourd’hui dans de multiples applications de haute sécurité, et notamment dans les transports aériens ;
- 2002 : Inria lance avec Bull et France Télécom R&D le consortium Objectweb, qui s’attache à construire une plate-forme middleware standard et complète en source libre, orientée infrastructure d’entreprise ;
- 2003 : Inria s’associe à d’autres partenaires industriels et académiques pour lancer le consortium Scilab autour du logiciel éponyme de calcul scientifique développé avec l’École nationale des Ponts et Chaussées ;
- 2004 : Inria, le CEA et le CNRS lancent CeCiLL, première licence qui définit les principes d’utilisation et de diffusion des logiciels libres en conformité avec le droit français ;
- Juin 2009 : Graphite , plate-forme pour la recherche en modélisation 3D et image de synthèse, développée par une équipe-projet du centre de recherche Inria Nancy - Grand Est, obtient le prix spécial du jury pour le projet le plus innovant en cours de développement et le 3e prix dans la catégorie "sciences" (applications ou outils utiles pour la recherche et les sciences) à la 5e édition des Trophées du Libre ;
- 2009 : plus de 300 logiciels libres sont diffusés par les équipes-projets Inria ;
- 2016 : ouverture au public du projet Software Heritage. Ce projet, à l’initiative d’Inria, a pour objectif de collecter, organiser, préserver, et rendre accessible à tous le code source de tous les logiciels disponibles ;
- 2017 : création du dispositif InriaSoft.
- 2018 : collaboration entre IES-Inria, SWH et le CCSD pour la création du type logiciel dans HAL
- 2022 : Les premiers prix science ouverte du logiciel libre de la recherche ont été remis le 5 février 2022 lors des journées européennes de la science ouverte. Trois logiciels soutenus et portés par Inria récompensés : Coq, Scikit-Learn et OpenViBE.