Interactions humain-machine

PEPR O2R : vers une nouvelle génération de robots plus proches des humains

Date:
Mis à jour le 18/07/2024
Piloté par le CEA, le CNRS et Inria et doté d’une enveloppe de 34 millions d’euros, le PEPR O2R a pour objectif de repenser le secteur de la robotique, afin de faire émerger une nouvelle génération de robots capables d’interactions fluides et naturelles avec les utilisateurs, d’adaptation sociale dans leurs interactions, et produisant des services appropriés, réactifs et fiables aux citoyens.
PEPR O2R
© Inria / Photo M.Magnin

Réinterroger en profondeur la conception des robots

La conception actuelle des robots, fortement liée à un usage pour l’industrie, entraine des difficultés et même des échecs dans les interactions avec les humains. Un constat qui a accéléré la création du Programme et équipement prioritaire de recherche (PEPR) O2R, copiloté par Inria, le CNRS et le CEA. L’objectif de ce PEPR est de revisiter en profondeur la conception matérielle et l’implémentation logicielle des robots, en intégrant dès le départ une réflexion sur les conditions d’une robotique adaptée à l’interaction avec les utilisateurs.

« Les questions derrière ce PEPR sont : qu’est-ce qui ne marche pas et pourquoi ? L’interaction sociale avec les robots n’est pas naturelle. Cela vient notamment du fait qu’on a beaucoup poussé la technologie ces dernières années, ce qui est une bonne chose d’une part, mais qui d’autre part a été accompagné d’un manque de réflexion sur l’usage et le cadre dans lequel on intégrait les robots », explique Christian Duriez, responsable de l’équipe-projet DEFROST du centre Inria de l'Université de Lille et copilote du programme O2R.

Une solide communauté robotique – SHS pour répondre à ces enjeux

D’une durée de huit ans, le programme O2R veut ainsi impulser une dynamique autour d’une nouvelle communauté mêlant acteurs de la robotique et des sciences sociales afin de déconstruire l’image des robots, c’est-à-dire l’image que l’on s’en fait, pour ensuite développer une nouvelle génération de robots au service de l'humain et stimuler, dans une optique prospective, une réflexion plus globale sur le rapport entre robotique et société. 

« Au cœur de cette réflexion, il y a de nombreuses questions techniques : comment faire avancer la recherche dans le domaine, au travers d’actions structurantes autour de la conception des robots, la définition des mouvements, l‘intégration de l’IA, l’interaction avec l’environnement et l’aspect modélisation et simulation ? Mais au lieu de les étudier en ne se concentrant que sur la recherche en robotique, nous voulons y intégrer des acteurs des SHS (sciences humaines et sociales)  », indique Christian Duriez, avant d’ajouter « Nous allons aussi travailler avec des artistes, en proposant par exemple des résidences d’artistes dans les laboratoires, l’idée étant d’aller vers un dialogue avec la société. » 

La robotique, un enjeu fort pour Inria

Une marge de manœuvre pour envisager des projets futurs

Le programme, qui vient de débuter une première phase de financement sur cinq ans autour de projets déjà structurés, lancera ses deuxième et troisième phases dans respectivement deux et quatre ans. L’objectif : se laisser du temps pour faire un bilan de la première phase, et se donner la possibilité de faire évoluer les projets ou d’en lancer de nouveaux en fonction des thématiques émergentes. « Nous ne voulons pas tout figer immédiatement. Une des forces de la communauté robotique française est sa capacité à travailler dans la concertation. Dans la construction du PEPR, il a fallu faire des choix mais la porte reste ouverte, notamment pour les jeunes chercheurs. Collectivement, nous devons réussir à tirer notre épingle du jeu, en pensant la robotique autrement », explique Christian Duriez. 

Le programme se concentrera en particulier sur l’assistance à la personne en situation de handicap, ou l’assistance au travail comme premiers cas d’usage, avec notamment la problématique de réduction de la distance entre le robot et l’humain dans le cas d’une prothèse ou d’un exosquelette. Il y a aussi des sujets plus fondamentaux comme la capacité à modéliser, à mettre en équation, la partie mathématique des sciences de la robotique. Visant le long terme, le programme entend intégrer les problématiques environnementales, la limitation des ressources pour analyser l’évolution du secteur au travers des tendances qui l’entourent, comme l’intelligence artificielle ou l’émergence des robots souples mais surtout influer sur son avenir. Et Christian Duriez de conclure :

L’objectif global, c’est de montrer des résultats par des applications concrètes. Si les actions structurantes ont pour objectif de faire un travail de fond sur le secteur, nous avons aussi des projets intégrés avec des cas d’usage plus concrets. Quelle robotique va émerger dans dix ans ? C’est à nous de nous impliquer pour la construire.

Christian Duriez est directeur de recherche chez Inria. Il a obtenu un doctorat en robotique de l'Université d'Evry et du CEA en France en 2004, suivi d'un poste postdoctoral au CIMIT SimGroup à Boston. Il est arrivé chez Inria en 2006 et a travaillé sur la simulation interactive d'objets déformables et le rendu haptique, en se concentrant sur la simulation chirurgicale. Il a été promu directeur de recherche en 2014 et dirige actuellement l’équipe DEFROST, créée en janvier 2015. En 2018, il a été chercheur invité à l'université de Stanford. Ses thèmes de recherche sont les modèles et le contrôle des robots souples, les méthodes d'éléments finis pour le calcul temps réel, la simulation de la réponse au contact, le rendu haptique… Il a participé à la création du framework open source SOFA. Il est également l'un des fondateurs de la société InSimo (créée en 2013) et il vient de fonder une nouvelle entreprise Compliance Robotics (2024) qui valorise ses travaux de recherche en robotique souple.