Développer des bioprocédés capables de purifier des eaux contaminées : Francesca Casagli lauréate du prix L’Oréal – UNESCO 2022
Mis à jour le 13/12/2023
Les prix L'Oréal-Unesco récompensent chaque année de jeunes chercheuses d’exception. Francesca Casagli, chargée de recherche au sein de l’équipe-projet Biocore, commune entre le centre Inria d’Université Côte d’Azur, INRAE et le Laboratoire d'Océanographie de Villefranche-sur-Mer (LOV), est l’une des 35 lauréates du prix Jeunes Talents « Pour les femmes et la science » visant à promouvoir la place des femmes dans la science.
Modéliser des écosystèmes artificiels
Les travaux de Francesca Casagli, ingénieure et modélisatrice en environnement, l’amènent à modéliser des écosystèmes artificiels, composés de consortiums mixtes de microalgues et de bactéries, pour l'épuration des eaux contaminées et la récupération de l'énergie chimique qu'elles contiennent. Il s’agit de créer un modèle mathématique hybride, suffisamment précis pour concevoir de nouveaux bioprocédés, capables non seulement de purifier l'eau contaminée par les déchets anthropiques mais aussi de minimiser la production de gaz toxiques et à effet de serre, tels que le dioxyde de carbone, l'ammoniac et l'oxyde nitreux. Les enjeux ? Rien moins que de trouver des solutions qui puissent être appliquées à l'échelle industrielle pour réduire certaines des causes du dérèglement climatique actuel.
Contribuer à la préservation des ressources en eau
L'eau est une ressource essentielle à la vie et il est primordial de la recycler efficacement. Plus de 50 m3 par an d'eaux usées sont produits en moyenne par européen et la gestion de leur assainissement et de leur réintroduction dans l'environnement, en minimisant les impacts négatifs sur les écosystèmes naturels et sur la santé humaine, est un défi majeur. Une grande partie de nos déchets se retrouve dans l'atmosphère sous forme de gaz nocifs et de gaz à effet de serre.
Je désire apporter ma contribution à la préservation de la planète pour les générations futures, explique-t-elle.
En outre, le recyclage de l'énergie, de l'azote et du phosphore est devenu l'un des principaux objectifs des systèmes d'assainissement des eaux usées. C'est pourquoi une approche de nouvelle génération vers l'efficacité opérationnelle est de la plus haute importance dans les installations de récupération des ressources en eau (WRFs). Malheureusement, malgré les progrès réalisés au cours des dernières décennies, l'utilisation de stratégies de gestion avancées, guidées par des modèles numériques est encore très limitée.
Une meilleure visibilité pour les jeunes chercheuses
Ce sont ces travaux qui valent à la jeune scientifique de faire partie cette année des lauréates des Bourses France L’Oréal-UNESCO "Pour les Femmes et la Science".
Ce programme "Jeunes talents" est une excellente occasion de donner de la visibilité aux jeunes femmes et aux projets de recherche sur lesquels elles travaillent. C’est aussi une formidable reconnaissance de leur travail et un grand encouragement à continuer, tout en s'efforçant d'être un exemple pour les générations futures de femmes, afin qu'il y ait de plus en plus d'exemples de femmes qui ont choisi de faire carrière dans la recherche scientifique et qui ont obtenu d'excellents résultats, nous explique Francesca Casagli avec enthousiasme.
Une vocation scientifique précoce pour l'ingénierie de l’environnement
Dès ses études secondaires, son professeur de mathématiques et de physique l'a amenée à s'intéresser aux sujets scientifiques. Poussée par une forte curiosité pour ces sujets, elle a décidé de s'inscrire à l'école d'ingénieur de Florence. Amoureuse de la nature, de notre planète, et préoccupée par le changement climatique et les problèmes environnementaux d’origine humaine, elle s’est ensuite orientée vers une carrière d'ingénieure en environnement et plus précisément vers les systèmes de purification des eaux contaminées.
Elle a ensuite entamé un doctorat en ingénierie de l'environnement et des infrastructures au Politecnico di Milano, afin de poursuivre ses recherches. Elle a développé un modèle mathématique, qui a permis de décrire en détail les interactions entre les microalgues et les bactéries dans le traitement des eaux contaminées, permettant d'évaluer l'efficacité du système et la production de microalgues dans différentes conditions de fonctionnement et de saison, tout en minimisant les émissions de gaz à effet de serre.
Actuellement chargée de recherche à Sophia Antipolis, au sein de l’équipe-projet Biocore, ses travaux portent sur la modélisation mathématique des bioprocédés en vue de leur optimisation en hybridant les approches traditionnelles de modélisation avec d'autres approches issues du domaine de l'intelligence artificielle du type réseaux de neurones. Tout au long de sa carrière, elle a eu l'occasion de travailler avec des scientifiques extrêmement compétents et passionnés qui lui ont transmis non seulement leurs connaissances, mais aussi leur passion et leur dévouement pour la recherche et la science. « Notamment ma directrice de thèse pendant mon doctorat, souligne-t-elle, une chercheuse femme incroyable et un exemple pour moi. »
Femme de science
Le monde de la recherche scientifique a besoin de femmes talentueuses, « qui ne vivent pas dans l'idée qu'elles doivent choisir entre une carrière et une famille ». C’est un métier très stimulant, qui « vous met constamment au défi, où vous ne cessez d'apprendre, en vous fixant constamment de nouveaux objectifs, meilleurs et plus ambitieux. C'est aussi un travail très satisfaisant, car on a le sentiment de faire vraiment quelque chose d'utile pour la communauté, la planète et les générations futures. Les jeunes femmes doivent se sentir libres et fières de poursuivre une carrière scientifique et d'apporter leur précieuse contribution au monde de la recherche scientifique. »
Citoyenne engagée
Francesca Casagli entend poursuivre son projet de recherche en y impliquant des étudiants de master, de doctorat et postdoctorat de différentes nationalités, afin de favoriser les échanges scientifiques entre les différents pays. Elle souhaite également participer plus activement à la médiation scientifique, afin de sensibiliser toutes les générations aux questions environnementales et au changement climatique. « Ces questions constituent un énorme problème qui touche tout le monde, pas seulement les chercheurs qui consacrent leur vie à y travailler. » Citoyenne moderne et engagée, elle ajoute : « Je pense qu'il est crucial que chacun joue son rôle et que c'est un devoir pour les chercheurs comme moi qui travaillent sur ce sujet de faire le premier pas. »
Contact
Francesca Casagli
Chargée de recherche
Centre Inria d'Université Côte d'Azur - 2004, route des Lucioles
,
06560 Valbonne Sophia Antipolis