Comment le projet VERARE est-il né ?
Quelques semaines avant la crise sanitaire ! Avec Yoann Launey, Médecin en réanimation chirurgicale au CHU de Rennes, nous avons imaginé un concept très innovant basé sur la RV (réalité virtuelle) pour venir en aide aux patients des services de réanimation qui sortent d'un état de coma. Affaiblis, avec des difficultés pour reprendre la marche, ils bénéficient actuellement de peu de moyens de rééducation à ce stade. Nous avons ensuite transformé cette idée en véritable projet scientifique avec Mélanie Cogné, Médecin de médecine physique et de réadaptation (MPR) au CHU de Rennes, et collaboratrice au sein de l'équipe Hybrid. Lorsque la crise sanitaire est arrivée, nous avons tout de suite pensé que ce projet pourrait servir de base à la rééducation des patients atteints du Covid-19 qui se retrouvent dans cette terrible situation. Nous avons tous grandement accéléré les choses pour pouvoir sortir cette application le plus vite possible, et répondre aux besoins de la crise sanitaire.
Verbatim
Suite à une discussion autour des neurosciences et de la réalité virtuelle (RV) avec Anatole Lécuyer lors d’un échange informel, est née l'idée innovante de proposer la RV comme outil permettant d'entamer, à un stade précoce, une rééducation des patients comateux sortants de réanimation, la plupart du temps très affaiblis par une situation de stress physique et psychique intense. Le projet est extrêmement motivant car il permet d'apporter une aide de rééducation directement en réanimation au lit du patient.
Médecin anesthésiste-réanimateur en réanimation chirurgicale au CHU de Rennes.
Comment le projet s'est-il développé ? Quels sont ses objectifs ?
Après une hospitalisation en réanimation, 50% des patients présentent une neuromyopathie, c’est-à-dire une atteinte des nerfs et des muscles conséquentes à l’immobilisation et aux traitements utilisés. Chez les patients atteints par le Covid-19 et hospitalisés en réanimation pendant plusieurs semaines, ce chiffre est similaire voire supérieur. La neuromyopathie va avoir pour conséquence de retarder leur reprise de la marche, leur sortie d’hospitalisation et diminuer leur autonomie dans les actes de la vie quotidienne. Les environnements de réalité virtuelle (RV) sont déjà utilisés pour l'évaluation et la prise en charge rééducative de patients atteints par des pathologies neurologiques, et ils ont fait leurs preuves. Il nous a donc semblé opportun de proposer l’utilisation d’environnements virtuels pour ce nouveau type d’usage et par conséquent pour la prise en charge rééducative des patients Covid-19 +.
Avec VERARE, le patient hospitalisé va être immergé dans des environnements virtuels différents à l’aide d’un casque de RV. Il y sera représenté par un avatar, son double virtuel. Il se verra en train de réaliser différentes tâches motrices mettant en jeu ses membres inférieurs ; comme par exemple, marcher, trottiner, éviter des obstacles, etc. Nous demandons au patient d’observer ces actions, puis d’imaginer que c’est lui-même qui les réalise dans l’environnement virtuel. Notre hypothèse principale est que l’observation d’actions virtuelles, comme la marche, et la reprise progressive d’une activité motrice en RV, permettront de démarrer plus rapidement la rééducation, et ce dès la sortie du service de réanimation. Le patient pourra alors réaliser des séances dans sa chambre, voire même depuis son lit d’hospitalisation, dans des conditions simples et sécurisées, en espérant obtenir un bénéfice clinique final, soit en termes de récupération soit en termes de durée d’hospitalisation. Il s’agit là d’un projet très innovant, car à notre connaissance la réalité virtuelle n’a encore jamais été utilisée à ce stade de la prise en charge d’un patient et pour ce type de rééducation dans les services de réanimation ou de médecine physique et de réadaptation en France ou à l’étranger.
Porteurs : Anatole Lécuyer, directeur de recherche Inria et responsable de l’équipe de recherche Hybrid (commune à Inria, CNRS, université de Rennes 1 et INSA Rennes, et au sein de l’UMR IRISA), Yoann Launey, médecin en réanimation chirurgicale au CHU Rennes, et Mélanie Cogné, médecin de médecine physique et de réadaptation au CHU Rennes.
Partenaires : Inria et CHU Rennes
#RV #reeducation #neurosciences
Comment travaillez-vous avec vos partenaires ?
Le projet est d'abord très suivi au sein de l'équipe Hybrid : près de 18 membres de l'équipe se sont portés volontaires pour participer, de près ou de loin, à la conception et au développement de l'application. Plusieurs chercheurs sont fortement impliqués : Ferran Argelaguet, chargé de recherche Inria, Valérie Gouranton, maître de conférence INSA Rennes, Florian Nouviale, ingénieur de recherche INSA Rennes, et moi-même. Grâce à la grande réactivité d'Inria et au soutien de ses services de support à la recherche, nous avons pu très vite recruter pour ce projet : Justine Saint-Aubert sur un postdoctorat, et Quentin Denis-Lutard, pour un stage. Nous avons également pu lancer les achats de matériel.
Des réunions régulières ont lieu chaque semaine avec Mélanie Cogné, médecin au CHU de Rennes et collaboratrice au sein de l’équipe Hybrid, pour affiner le projet en fonction des besoins exprimés par les soignants des services de réanimation dont Philippe Seguin, professeur et chef de service de réanimation chirurgicale et Jean-Marc Tadié, professeur au sein du service de réanimation médicale, ainsi qu’avec Isabelle Bonan, professeur au sein du service de MPR. En parallèle, Mélanie Cogné a rédigé tous les documents réglementaires nécessaires, et le CHU de Rennes les a traités en un temps record. Le travail a démarré fin avril, et nous visons un déploiement de la première version de notre application à l'hôpital à la mi-juin.
Si tout se passe bien, les premiers patients pourront donc commencer à utiliser notre application de réalité virtuelle au CHU de Rennes deux mois seulement après l'ébauche du projet … ce qui constitue en soi une réelle prouesse !
Verbatim
Lorsque Anatole Lécuyer m'a rapporté sa discussion avec Yoann Launey autour de l'utilisation de la réalité virtuelle pour les patients de réanimation, son enthousiasme a été communicatif et l'intérêt d'utiliser ces outils dans cette population fragile et pour laquelle la rééducation traditionnelle présente des limites nous est apparu comme évident. La structuration du projet a été ensuite très rapide, et portée par la motivation commune des équipes de médecine physique et de réadaptation, de réanimation et Hybrid d’Inria.
Médecin de Médecine Physique et de Réadaptation, Université et CHU de Rennes
Les contributeurs du projet VERARE (par ordre alphabétique) :
Anatole Lécuyer, Diane Dewez, Ferran Argelaguet, Florence Celant, Florian Nouviale, Gwendal Fouché, Justine Saint-Aubert, Mélanie Cogné, Quentin Denis-Lutard, Rafik Drissi, Rebecca Fribourg, Ronan Gaugne, Thomas Howard, Valérie Gouranton, Victor Mercado, Yoann Launey.