Les chercheurs et chercheuses d’Inria participent à trois projets interdisciplinaires visant à développer des outils d’aide à l’amélioration des performances sportives de haut niveau à l’horizon des Jeux olympiques et paralympiques 2024. La course est lancée !
À la différence des sportifs, l’échéance des Jeux olympiques et paralympiques de Paris pour les scientifiques est en 2022 ! En effet, les chercheurs doivent fournir à différentes fédérations sportives des outils les aidant à atteindre l’objectif fixé par le ministère chargé des Sports de doubler le nombre de médailles de la France en 2024. Les équipes d’Inria sont ainsi mobilisées dans trois des six projets retenus fin 2020 suite à seconde vague d'appel à projets du Programme d'investissements d'avenir Sport de très haute performance. Bien qu’elle ne figure pas au panel des épreuves, la collaboration entre science et sport a ses propres défis à relever !
Sport2024 : apprendre à comprendre les besoins
Pour répondre aux contraintes du calendrier serré des sportifs de haut niveau, les chercheurs suivent leur propre devise olympique : compréhension, adaptation, solution. Se comprendre est essentiel afin de transposer un problème de terrain en une problématique de recherche. Pour cela, les scientifiques collaborent directement avec les entraîneurs et les référents scientifiques des fédérations. « Il faut d'abord une compréhension très fine de leurs besoins et méthodes. C’est un bel exercice méthodologique et un apport certain à nos recherches que de se frotter à leurs problèmes utilisateurs, très concrets, dans un contexte exigeant et expert », confie Stéphane Huot, contributeur au projet PerfAnalyticset responsable de l’équipe Loki* d’Inria Lille - Nord Europe.
Des réunions ponctuelles avec les fédérations aident également à identifier le cœur des problèmes à cibler. « Lors de ces rencontres, nous proposons notamment des dispositifs instrumentés pour leur apporter des éléments objectifs de mesure de performances. C’est de la recherche ultra appliquée, au plus proche de son utilisateur », décrit Lionel Reveret, porteur de PerfAnalytics et chercheur à Inria Grenoble - Rhône-Alpes.
Afin de développer des outils rapidement opérationnels, les chercheurs du projet PerfAnalytics interviennent auprès des sportifs lors de leurs séances d’entraînement. L’objectif ? Capter un maximum d’informations sur le mouvement de l’athlète pendant sa performance. Pour cela, les chercheurs font appel à des techniques les plus discrètes possible afin de ne pas altérer ladite performance. Pas question d’utiliser des marqueurs gênant le mouvement dans le cadre de l’escalade par exemple. Parmi les applications envisagées, la vidéo sert à mesurer la qualité de la posture d’un gymnaste, des prises d’escalades ou des pédales instrumentées mesurent les efforts d’un athlète, etc.
La plate-forme expérimentale Kinoviscomplète également les mesures pour une analyse 3D de la géométrie corporelle. En escalade, par exemple, les chercheurs utilisent un avatar 3D de l’athlète projeté sur une vidéo apportant des informations supplémentaires, comme en réalité augmentée. Ils apportent ainsi une mesure objective de la posture, mise en relation avec une situation réelle.
Les chercheurs s’adaptent à tous les besoins des sportifs. Si bien que leurs outils se destinent à la fois à la compréhension d’une performance, à la mise en place de stratégies ou encore à cibler des points faibles à perfectionner.
De nouvelles méthodes d’entraînement
L’entraînement des sportifs s’appuie sur la décomposition de compétences en sous-compétences. S’entraîner à courir ne suffit pas à améliorer sa vitesse, il faut aussi travailler la coordination motrice, se muscler, etc. Pour améliorer une performance globale, il est donc possible de créer des outils dédiés à chaque sous-compétence. Dans le cadre du projet Revea, l’équipe MimeTIC utilise la réalité virtuelle pour compléter l’entraînement d’un athlète. En boxe, l’outil permet de travailler l’anticipation des attaques de l’adversaire. Un entraînement qui est autrement limité dans la "vraie vie" car l’athlète devrait encaisser les coups. En ce sens, la réalité virtuelle permet de multiplier les répétitions d’exercices sans risque de blessure. « Elle offre aussi une gamme de stimulus qui dépasse la réalité. Il est possible de jouer sur les perceptions visuelle, auditive, ou encore d’affronter un adversaire aux capacités extraordinaires afin de pousser les limites de l’entraînement traditionnel », ajoute Franck Multon, responsable de l’équipe MimeTic d’Inria Rennes - Bretagne Atlantique.
À partir de données alliant biomécanique, neurosciences et intelligence artificielle, le projet Best Tennis, auquel contribue le laboratoire Mouvement, sport, santé (M2S) de l’université Rennes 2, a le même objectif. Il cible l’entraînement du service et de son retour au tennis. Une phase de jeu déterminante pour la victoire finale.
Performance : des solutions adaptées et adoptées
Les sportifs présentent une réelle appétence pour ces nouveaux outils au point de répéter davantage les exercices menés en virtuel, tels ceux proposés dans le cadre de Revea. C’est bien là un des enjeux majeurs de ces collaborations : l’adoption des solutions. Dans le cadre de PerfAnalytics, l’équipe Loki travaille notamment sur de nouveaux modes d’interaction et des interfaces avancées pour l'annotation semi-automatique de vidéos de performances. Un algorithme d’apprentissage automatique aide ainsi un utilisateur humain à identifier et marquer chaque événement composant une performance. « In fine, même si nous produisons de bons outils et qu'un athlète obtient une médaille, nous ne saurons jamais dans quelle mesure nous y aurons contribué », remarque Stéphane Huot. Toutefois, les résultats issus de ces projets auront toujours un impact bénéfique sur d’autres travaux dans des contextes et pour des usages plus communs. Ce qui est en soi une belle victoire !
Les chercheurs Inria engagés dans trois projets interdisciplinaires pour Paris 2024
Best-Tennis
Son objectif est d'optimiser la performance du service et du retour de service des joueuses et joueurs de tennis. L’approche scientifique utilise des expertises enbiomécanique pour réduire le risque de blessure, en neurosciences sur la prise d’informations et l’intelligence artificielle à des fins stratégiques.
Partenaires : Inria, Laboratoire M2S - Université Rennes 2, CNRS, CEA, Institut Supérieur de l'Aéronautique et de l'Espace, Institution Nationale des Invalides, Université Sorbonne Paris Nord, Ecole Nationale des Sports de Montagne, Tennis Stat, Trinoma , Volodalen, Fédération Française de Tennis, CREPS de Toulouse
PerfAnalytics
Comment analyser automatiquement les mouvements d’un sportif à partir de l’outil vidéo pour objectiver ses performances ? C’est l’enjeu de ce projet, soutenu par les fédérations de boxe, cyclisme, gymnastique, lutte et escalade qui se mène au plus près des sportifs pour capter leurs mouvements et cibler leurs entraînements.
Partenaires : Inria, Université Grenoble Alpes, Université de Poitiers / CNRS DR08, Université Gustave Eiffel, Aix-Marseille Université, Fédération Française Montagne et Escalade, Fédération Française de Cyclisme, Fédération Française de Gymnastique, Fédération Française de Boxe, Fédération Française de Lutte, CREPS de Poitiers, TSF Voiron.
Revea
Soutenu par les fédérations d'athlétisme, boxe et gymnastique, ce projet met en avant l’utilisation de la réalité virtuelle pour améliorer les performances motrices des athlètes tout en limitant les risques de blessure.
Partenaires : Inria, Laboratoire M2S - Université Rennes 2, PSMS et CReSTIC - Université Reims Champagne Ardennes, Institut Sciences du Mouvement - Aix-Marseille Université, CIAMS - Université Paris-Saclay, INSEP, Fédération Française de Boxe, Fédération Française d'Athlétisme, Fédération Française de Gymnastique.
Une convention Inria-Insep
Dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques 2024, lnria et l'lnsep (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) ont souhaité renforcer leur collaboration scientifique par la signature d’une convention en novembre 2020. Cette convention a pour Inria l'objectif d’amplifier les recherches pluridisciplinaires déjà menées par une vingtaine d’équipes-projets Inria dans le domaine du sport.
Elle coordonne la coopération entre les deux instituts selon trois grands axes :
faciliter de manière réciproque l'accès à leurs infrastructures respectives ;
favoriser les échanges entre les scientifiques, les sportifs de haut niveau et leurs encadrants ;
définir les bases de la création d’équipes de recherche communes.
Les résultats de ces recherches conjointes, menées initialement dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques 2024 en partenariat avec les sportifs de haut niveau, pourront par la suite être élargis aux domaines du sport pour tous et des loisirs. Cette diffusion beaucoup plus large, dans l'ensemble de la société, s'inscrira ainsi dans la dynamique impulsée par Inria, dont l'ADN et les missions consistent à accroitre l’impact économique et social des recherches en sciences et technologies du numérique.
* Loki est une équipe-projet commune à Inria et au laboratoire CRIStAL (Centrale Lille, CNRS, Université de Lille)