Un programme pour une meilleure santé tout au long de la vie
Lancée à l’automne 2021 dans le cadre de France 2030, la stratégie nationale d’accélération sur la santé numérique vise à encourager la transition vers une médecine plus préventive, prédictive et personnalisée et à favoriser l’émergence d’un solide écosystème de la santé numérique en France.
Une stratégie qui inclut un Programme et équipements prioritaires de recherche (PEPR), également annoncé en octobre 2021. Celui-ci, dont le pilotage a naturellement été confié à l’Inserm et Inria (qui compte près de 30% d’équipes-projets dont les travaux sont en lien direct avec les sciences de la vie et de la santé), a pour but d’obtenir des avancées scientifiques et faire émerger des technologies de rupture nécessaires à l’évolution du système de prévention et de soins, d’ici 2030.
"L’objectif de ce PEPR, c’est de pouvoir mettre l’accent sur des éléments qui nous semblent stratégiques pour la qualité de vie des citoyens", explique Philippe Gesnouin, directeur du Programme santé numérique d’Inria et coordinateur du PEPR pour l’institut.
Les modèles multi-échelles, fil rouge du PEPR
Inria et l’Inserm ont ainsi communément décidé d’articuler le programme autour du développement de modèles multi-échelles pour la santé numérique, un domaine dans lequel la recherche française est en avance.
« Le multi-échelle, c’est la capacité à prédire des choses, des données, des comportements, à plusieurs échelles de temps, c’est-à-dire sur des durées variables allant de l’ordre de la microseconde à plusieurs dizaines d’années, et d’espace, donc allant de la cellule à l’organe, et en prenant même en compte les habitudes de vie du patient et son environnement », explique Hugues Berry, adjoint au directeur scientifique d’Inria en charge du domaine « Santé et biologie numériques » et co-pilote du programme pour l’institut.
L'ambition étant, d’ici 2030, de développer des techniques et des méthodes pour aller vers des jumeaux numériques multi-échelles réalistes. « Pour le moment nous sommes, par exemple, capables de prédire l’évolution de la pathologie d’un patient sur un horizon de quelques minutes après un examen d’imagerie médicale, et l’objectif est aujourd’hui de pouvoir le faire sur plusieurs années », ajoute Hugues Berry.
L’accent sera également mis, au-delà de l'exploitation des données actuellement disponibles, sur le développement de nouvelles méthodes d’acquisition de données multi-échelles (capteurs, imagerie) et de nouvelles approches numériques (y compris l'intelligence artificielle, la modélisation mathématique, la représentation numérique...) pour exploiter efficacement les données , mais également garantir la sécurité et la confidentialité des informations personnelles, ou s'assurer que les contextes sociaux, politiques, éthiques ou légaux sont pris en compte dans leur développement.
Quatre programmes prioritaires pour 17 axes de recherche
Deux domaines d’application sont en particulier visés dans ce programme : les maladies cardiovasculaires et les troubles neurologiques, pour lesquels des suivis à vie ou des collectes de données sur de longues périodes sont déjà disponibles et pour lesquels des interventions sont pertinentes à des stades précoces ou dans un but préventif. Les recherches ont été réparties en 17 axes scientifiques, construits autour quatre programmes prioritaires :
- développer des nouvelles méthodes numériques pour l’analyse multi-échelle des données de santé ;
- surmonter les défis techniques et sociodémographiques des usages des données de santé personnalisées et multi-échelles ;
- développer des applications dans le domaine cardiovasculaire ;
- et développer des applications dans le domaine des neurosciences.
Une seconde composante du PEPR sera consacrée au financement de nouveaux projets (représentant environ 45% du budget) sous forme d’appels à projets et/ou d’appels à manifestation d’intérêt, en cohérence avec les 17 projets précédemment lancés et des perspectives d’évolution du domaine.
Nous ne voulons pas nous disperser, mais nous nous donnons la possibilité d’avoir des moyens supplémentaires pour aller plus loin.
Philippe Gesnouin
Renforcer les liens au sein de la communauté scientifique
Inria et l’Inserm se sont ainsi, naturellement, entourés du CEA et du CNRS afin d’affiner le programme ensemble, et d’identifier les meilleurs laboratoires dans les domaines prioritaires du PEPR. L’objectif : sélectionner une cinquantaine d’experts considérés comme les plus avancés dans ces domaines, afin de leur confier l’assemblage des axes de travail.
L’idée, c’est de faire de gros projets multi-coopératifs capables de permettre aux différents acteurs du domaine de travailler ensemble en synergie, et non pas en concurrence les uns avec les autres comme c’est généralement le cas.
Hugues Berry
Au total, les partenaires de ces actions de mise en œuvre représentent un effort de recherche coordonné très important, réparti sur plus de 20 campus ou sites de recherche sur l'ensemble du territoire national, avec des équipes provenant de plus de 20 universités et écoles d'ingénieurs et de 4 organismes de recherche nationaux, et sont soutenus par un large ensemble de réseaux hospitaliers et cliniques nationaux. Le PEPR santé numérique travaille également en collaboration avec d’autres PEPR, à l’image du PEPR cybersécurité dans le cadre de la gestion des données de santé.
« À terme, l’objectif est vraiment d’être en mesure de fournir des briques de bases, des livrables compréhensibles et transmissibles à des tiers, que les soignants et l’industrie puissent utiliser pour développer plus rapidement de nouveaux dispositifs numériques ou de nouveaux produits industriels. Nous espérons également que nos résultats permettront de lancer de nouveaux projets de recherche, à l’échelle européenne », conclut Philippe Gesnouin.