Inria-Brasil : Inria et le LNCC renforcent leur partenariat

Historiquement nombreux, les liens entre les chercheurs d'Inria et du Brésil, via le LNCC (Laboratoire national de calcul scientifique), le principal acteur national de la recherche en informatique au Brésil, ont été resserrés, en 2020, grâce à la signature d'un premier protocole d’accord visant à renforcer la coopération scientifique entre les deux établissements. « Le partenariat Inria-Brasil a pour objectif de faire de la recherche d’excellence sur des sujets d’intérêt commun, et en particulier dans les domaines du calcul haute performance (HPC, "High Performance Computing"), de la science des données, de l’intelligence artificielle et du calcul scientifique », précise Patrick Valduriez, directeur scientifique d'Inria-Brasil, chercheur émérite Inria et ancien responsable de l'équipe-projet Zenith de l'antenne Inria de l'Université de Montpellier. Il collabore régulièrement avec des chercheurs brésiliens depuis les années 1990.  « Ce partenariat vise aussi à faire de l'innovation afin d’avoir de l’impact sur la société et l’industrie. »

Pour les calculs, le supercalculateur Santos-Dumont (en référence au pionner brésilien de l'aviation) du LNCC, fabriqué par Atos, est lui le plus puissant d'Amérique latine dans le domaine académique. Installé à Petrópolis, il offre une capacité de traitement totale d'environ 5,1 quadrillions d'opérations par seconde.

Un nouvel accord stratégique vient d'être signé à l'occasion du Inria-Brasil Workshop (IBW), le premier séminaire en présentiel organisé par Inria-Brasil (du 10 au 14 avril 2023, à São Paulo en partenariat avec l'Université de São Paulo (USP), et à Petrópolis, dans l'état de Rio de Janeiro en partenariat avec le LNCC et l’Université fédérale de Rio de Janeiro (UFRJ). 

Et de poursuivre : « Je pense par exemple à l'Embrapa, acteur majeur de la recherche agricole au Brésil, et à l'INRAE (Institut national de la recherche agronomique), à l'IRD (Institut de recherche pour le développement) et au CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), côté français. L'agriculture numérique est un sujet d'intérêt majeur pour nos deux pays. L’objectif affiché du Brésil est de pouvoir nourrir 40% de la population mondiale dans les dix prochaines années. »

Inria-Brasil, qui fédère à ce jour une vingtaine de projets collaboratifs impliquant une vingtaine d’équipes-projets Inria et une vingtaine d’équipes brésiliennes (environ 200 chercheurs et doctorants, en France et au Brésil), envisage désormais d'autres collaborations sur des sujets spécifiques au Brésil avec des groupes français qui disposent d'activités de recherche et de développement conséquentes dans ce pays et ont signé avec Inria des accords-cadres de collaboration. C'est le cas d'Atos, de Total Energies et de Stellantis. Des chercheurs de ces entreprises ont d'ailleurs participé au workshop IBW, en avril, aux côtés d'une centaine d'autres intervenants.

© Inria Brasil

Inria-Brasil Workshop (IBW)

Au programme des conférences et discussions, par exemple : la présentation du laboratoire de recherche sur l'intelligence artificielle C4AI, cofinancé par IBM et la FAPESP (Fondation d'appui à la recherche de l'État de São Paulo), et de nombreuses sessions sur la recherche mathématique appliquée à l'épidémiologie.

La santé, et notamment la recherche sur la Dengue, une maladie très présente au Brésil, fait en effet partie des principales priorités partagées, sur laquelle se concentrent aussi bien des laboratoires de l'INSERM, en France, que de Fiocruz, au Brésil. Mostafa Adimy, responsable de l'équipe-projet grenobloise Dracula (Centre Inria de Lyon), a notamment fait état des recherches en cours visant à modéliser les effets de la PrEP (un traitement préventif pour les personnes très exposées au VIH) sur la propagation du Sida, tandis que sa collègue brésilienne Suani T. R. Pinho (Institut de physique de l'Université fédérale de Bahia) a dévoilé les ultimes découvertes de son laboratoires liées à l'utilisation en temps réel de données épidémiologiques pour la modélisation des risques.

« L'une de nos réussites, que j'ai présentée dans la conférence que j’ai donnée le 12 avril, est aussi liée à Provlake, un système de gestion de données capable d'interroger efficacement les données dans des services et workflows distribués », explique Patrick Valduriez. « Ce système est le fruit d'une collaboration avec l’université brésilienne UFRJ et IBM Brazil, dans le cadre d’une thèse de doctorat que j’ai codirigée. Ce travail a conduit à un transfert vers IBM Brazil, qui a intégré le logiciel dans son offre de services au Brésil pour ses clients dans le domaine de l’énergie. »

Les recherches de Clément Maria offrent un autre exemple de collaboration en cours, ayant donné lieu à des échanges lors du workshop. Ce chercheur est professeur invité à l’École de mathématiques de la Fondation Getulio Vargas (FGV-Emap à Rio de Janeiro) et membre de l'équipe-projet DataShape, commune au Centre Inria de Saclay et au Centre Inria d'Université Côte d'Azur  « Nous travaillons actuellement avec mes collègues de la FGV/EMAp sur un raffinement des techniques existantes pour extraire plus d'information sémantique sur la "forme" des données, avec des méthodes topologiques plus fines », souligne-t-il.  « Nous discutons également avec les statisticiens de l'EMAp de méthodes aléatoires pour améliorer les algorithmes combinatoires en topologie. »

Chacun apporte ses forces aux projets, tant en ce qui concerne les chercheurs que les logiciels et les équipements. Le projet HPDaSc, une équipe associée Inria, codirigée par Patrick Valduriez et Fabio Porto, au LNCC, mobilise ainsi en permanence environ 25 chercheurs des deux côtés de l'Atlantique. « Les défis en matière de recherche sont d’allier le machine learning avec l'analyse et la simulation, de faire l'analyse et la visualisation en temps réel des données, et enfin de traiter efficacement des workflows complexes qui combinent analyse, modélisation et simulation », indique le chercheur émérite. Les nouvelles techniques développées sont validées avec des logiciels développés dans les deux pays : OpenAlea et Pl@ntNet, côté Inria, et DfAnalyzer et Savime, du côté du Brésil.