Pour connaître la genèse de Mnemosyne, il faut revenir plus de trente ans en arrière. Nous voilà en 1990. Frédéric Alexandre, qui vient de soutenir une thèse sur la modélisation fonctionnelle du cortex, rejoint en tant que chargé de recherche le projet SYCO d’Inria Nancy. Sa particularité ? C’est l'un des premiers projets à travailler, chez Inria, sur l’intelligence artificielle sur des aspects aussi bien numériques que symboliques. Dix ans plus tard, le chercheur décide de faire évoluer ses travaux de recherche vers les neurosciences en créant le projet "Cortex", dont l’objectif principal est de s’intéresser au versant neuronal de l'intelligence artificielle (IA), en insistant de plus en plus sur les aspects bio-inspirés du calcul neuronal.
Reproduire les mécanismes du cerveau pour améliorer les algorithmes d’IA
Deux expériences qui le conduisent à vouloir travailler au quotidien, dès 2012, dans les neurosciences. Partant du constat que les systèmes d’intelligence artificielle sont très performants sur leurs domaines de compétences, qui correspondent cependant à des fonctions cognitives élémentaires (reconnaissance, prédiction, contrôle), mais que l’on est encore loin des fonctions cognitives supérieures humaines (raisonnement, résolution de problèmes, créativité, etc.), Frédéric Alexandre propose alors de créer un nouveau projet : Mnemosyne.
Verbatim
Nous cherchons à comprendre comment le cerveau réalise ces fonctions et à proposer des modèles neuronaux capables de reproduire leurs propriétés les plus importantes, et en particulier la flexibilité de nos stratégies de résolution, l’acquisition et la manipulation de connaissances, leur ancrage sémantique et l’explicabilité qui permet de justifier nos décisions.
Responsable de l’équipe-projet Mnemosyne
Hébergé dans un laboratoire de neurosciences sur le "Neurocampus" de Bordeaux, l’équipe-projet Mnemosyne travaille aujourd’hui main dans la main avec plusieurs équipes de recherche de l'IMN (Institut des maladies neurodégénératives), sur diverses thématiques : modélisation de la prise de décision, modélisation du codage de récompense, organisation temporelle du comportement et enfin traitement des données générées par les différentes équipes.
« Grâce à nos travaux sur le chant des oiseaux et sur l’interaction humain-robot, nous cherchons à mieux comprendre comment le langage et la sémantique émergent des interactions entre le corps et le cerveau. Les travaux menés avec les neurosciences sur la prise de décision chez le rongeur et le primate permettent d’élaborer un cadre général de modélisation pour mieux comprendre les interactions entre mémoires implicite et explicite, entre "savoir faire" et "savoir que" », précise Frédéric Alexandre.
Un partage d’expérience en interne comme en externe
Les résultats des travaux de Mnemosyne ont pour but d’être transférés vers les neurosciences et la médecine mais aussi vers l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique. L’équipe-projet partage également son expérience sur l’intelligence artificielle auprès du grand public, en participant par exemple au Mooc citoyen Class’Code IAI, accessible à tout type de public, ou au forum annuel AI For Industry, qui se concentre sur la formation à l’intelligence artificielle orientée vers le transfert industriel.
Egalement, les travaux de Mnemosyne sont aujourd’hui pris en compte dans le cadre de l’action exploratoire AIDE (Artificial Intelligence Devoted to Education), dont l’objectif est d’analyser l’impact que pourraient avoir des approches ou des techniques issues des neurosciences cognitives, en lien avec l'apprentissage machine et des outils symboliques pour représenter les connaissances, sur l'apprentissage humain tel qu'étudié en sciences de l'éducation.